Déjà trop loin pour faire demi-tour

S'il y a quelque temps déjà que l'on s'est perdu de vue. Si tu as décidé de sortir de ma vie pour une raison ou une autre. Ne sois pas offusqué que je réponde différemment à ton appel. Ne sois pas non plus surpris si j’ai besoin de réfléchir quelques heures, voire quelques jours, après avoir lu tes messages. Non, ce n’est pas que je t’ignore, c’est simplement qu’il y a de fortes chances que tu es en train de t’adresser à une ancienne version de moi. Et celle dont tu te souviens est loin derrière.

Tu vois, je me suis retrouvée à un carrefour et il m’a fallu choisir entre différentes voies. L’une d’elles m’a menée à un endroit familier. Cette zone de confort m’a apporté un bonheur qui s’est très vite révélé éphémère. Une deuxième route m’a conduite à un environnement apparemment nouveau, mais qui, en réalité, camouflait ce même cercle vicieux que je souhaitais briser.

Animée par ce besoin d’évoluer, j’ai ensuite emprunté une troisième voie. En essayant, tant bien que mal, de contourner le nombre important d'obstacles sur ce chemin, je suis tombée. J’ai parfois eu l’impression que je ne parviendrais jamais à destination. Puis, chaque fois qu'a osé naitre en moi l’envie d’abandonner, j'ai jeté un rapide coup d'oeil en arrière. La profonde obscurité qui s'offrait alors à mon regard était un rappel que je ne pouvais plus faire comme dans le temps. Faire du surplace ne m'a conduite nulle part et reculer m'a ramenée à la case départ. Quelle option me restait-il à part celle de continuer à avancer?

L'instant présent, c'est tout ce qui compte.

Pour mieux reprendre mon souffle et calmer mon esprit, je me suis assise en position du lotus. Je me suis abandonnée à ma destinée. Et c'est là qu'au travers de mes paupières closes, j'ai vu une lueur. J'ai compris que ce que je cherchais chez les autres était en fait devant moi, au-dessus de moi, en moi. Plus je reconnaissais l'importance de lâcher prise, de me pardonner, de prendre soin de mon Être, plus mon chemin s'illuminait. Assez pour me montrer par où je dois passer, mais sans me révéler ma destination finale ni le chemin parcouru. J'ai suivi une trajectoire tantôt droite, tantôt courbe.

Ni trop vite ni trop lentement, j'ai posé chacun de mes pas, au bon endroit et au bon moment.

Guidée par mon intuition, que j’ai finalement appris à écouter, j'ai ouvert les yeux à la lumière.

Je comprends que tu aurais aimé que l'on reprenne là où on l'en était. Malheureusement, cela m'est impossible. Par amour pour moi-même et par respect pour ma liberté, je ne peux m’arrêter en si bon chemin. Pour être sure de ne jamais oublier, je ne regarderai plus les cicatrices du passé. J'ai désormais un précieux aide-mémoire tatoué sur le coeur et sur le corps. Je ne suis plus celle que j'étais et je ne m'en excuserai pas.

Sylberte Desrosiers