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Quand le coeur s'incline

  • Writer: Sylberte Desrosiers
    Sylberte Desrosiers
  • Nov 26, 2018
  • 5 min read

À toi, le compositeur qui a déserté son studio d'enregistrement et qui laisse, bien malgré lui, son microphone capter plus de poussière que de sons. As-tu l'impression de faire du surplace depuis quelque temps? Tout ce que tu produis l'a déjà été, par toi ou quelqu'un d'autre. C'est du réchauffé ou, pire encore, une médiocre copie. Ça ne te ressemble plus... À toi l'artiste qui, comme moi, te retrouves souvent en panne au plan créatif. Sache que je te comprends.


Il t'est sûrement déjà arrivé de présenter de l'art brut, en exclusivité à des personnes qui se sont peut-être même autoproclamées admirateurs #1. Une version non remixée de ton travail. Un tantinet intense, mais vrai. Raw comme on dit. La réponse n'était sûrement pas celle à laquelle tu t'attendais. «Exprime-toi, mais pas trop. Parle, mais pas trop fort. Écris, mais pas à propos de ce sujet». Il t'est alors venu en tête le mot fatidique: censure. Te voilà muselé et dans un état léthargique qui te rend tellement inconfortable. Tu détestes ce sentiment, mais après avoir vu la réaction des gens, tu penses que c'est la meilleure solution. Découragement...




Tu vois, je me suis retrouvée, pendant longtemps, acculée au pied du mur. Avec comme seules options le silence ou l'exil. J'ai tenté l'un puis l'autre, sans réel succès. Après une longue période de réflexion, d'introspection et avec beaucoup d'encouragements, je me sentais prête. Prête à laisser aller ma créativité. Prête à transformer mes maux en mots, tout en me laissant guider par l'amour, la passion, par ma vérité.


J'écris comme je parle. Dans le sens que ce que j'écris sur papier ou sur le web, je l'ai probablement déjà exprimé dans une conversation à l'oral. Pourtant, j'hésite encore à publier certains de mes textes. J'ai tendance à écouter ceux qui me disent que je ne dois pas choquer. Qu'il ne faut pas que monsieur X ou madame Y se sente visés. Par peur du rejet, je place constamment les besoins des autres avant les miens. J'accorde plus d'importance à leur égo qu'à ma guérison. J'accepte de rester en cage, car ma liberté pourrait, au passage, écorcher quelques personnes.


En m'éloignant ainsi de ma vision, je me suis retrouvée assise à la table des laissés pour comptes. Je n'aimais pas ce qu'on me servait, mais j'avais faim. Je n’avais rien dans le ventre. Malgré le goût fade que me laissaient en bouche la frustration et le ressentiment, je suis restée à me gaver. Au point tel que j'ai remis en question mon art et du même coup, mon choix de retourner à mon premier amour. Avant de complètement me perdre, j'étais due pour me ressourcer, pour canaliser mon énergie. Me souvenir du pourquoi et du comment j'avais recommencé à écrire à temps plein.

Puis, pendant une édifiante séance de méditation, il y a cette petite voix, appelons-la mon ange gardien, qui m'a rappelé que je suis une artiste. Ce don que j'ai m'a aidée à me guérir de mes blessures émotionnelles. En racontant mon histoire, je ne fais pas qu'écrire ou partager mes expériences. J'instruis les autres. Je les guide vers l'épanouissement tout en répondant parfois à leur questionnement. Ce don m'a été attribué pour servir les autres. Il serait égoïste de le garder pour moi.



En tant qu'artistes, nous avons tendance à surestimer le pouvoir de ce que les autres pensent de nous. Surtout lorsqu'il s'agit de connaissances intimes. N'aie plus peur de montrer qui tu es vraiment. Crée, même si tu es critiqué par ton entourage. Ce n'est pas eux qui t'ont doué de ton don précieux. Alors pourquoi leur permettrais-tu de le contrôler? Chaque fois que tu te fies à ce que l'opinion des autres te dicte au lieu de te laisser guider par l'amour et la passion, tu dévies de ta mission principale. C’est la flamme de la créativité qui brûle en toi que tu laisses s'éteindre. À quoi servira une chandelle éteinte? Elle n'éclairera ni ne réchauffera personne.


L'art, c'est un dialogue entre l'artiste et son public. Nous parlons au travers de nos oeuvres. Tu comprendras qu'en édulcorant ton message, tu ne rends service ni à toi, ni aux autres. La vérité, c'est que si le fait de transformer tes blessures du passé en oeuvre artistique fait réagir, cela n'a rien à voir avec toi. La personne chez qui cela suscite des émotions fortes a tout simplement des dossiers non réglés dont elle prend soudainement conscience. Il est malheureusement plus simple de blâmer l'artiste et plus facile d'essayer de le faire taire que de prendre le temps de réparer ce qui est brisé en eux. Non seulement tu empêches les gens de réfléchir et de réaliser qu'il y a quelque chose qui doit changer dans leur vie, mais tu deviens un menteur. Tu renies ton identité, tu fais un gros trait sur ton authenticité.


Qu'on le produise ou qu'on le consomme, l'art, pour beaucoup de personnes, fait office de thérapie. Nous utilisons l'art pour libérer le trop-plein d'émotion, pour nous défouler. Nous nous en servons également pour expliquer notre vécu, à notre manière, à ceux qui veulent bien prendre le temps de nous lire, d'apprécier nos toiles, d'écouter notre musique, d'applaudir nos chorégraphies. Dis-toi qu'il y a quelqu'un, quelque part, qui a besoin que tu lui racontes ton parcours pour l'inspirer et lui offrir cette petite poussée pour continuer à avancer. Pour d'autres, tu deviens un ambassadeur, car tu diras tout haut ce que plusieurs pensent tout bas. Ne t'empêche donc pas de prendre la parole pour dénoncer ou pour évoquer des sujets tabous. Si tu ne parviens pas à faire entendre ta voix, dans la cacophonie d'un milieu artistique monotone, change ta fréquence et non ta cadence. Si tous les chemins que tu as empruntés jusqu’ici semblent t’emmener nulle part, demande conseil à ton coeur. Il t’aidera à paver une nouvelle voie.


Tu n'as pas choisi de devenir artiste, tu es né ainsi. Comme toi, ton talent est unique. Aimer ce que tu fais, c'est bien. En connaitre la réelle valeur, c'est mieux! Sais-tu qu’en cessant de créer, tu prives tout le monde, incluant toi, de ta lumière? Bloquer volontairement l'accès à ton produit revient à te cacher. Pourtant, quand tu aimes, quelque chose ou quelqu'un, ne devrais-tu pas être fier de le présenter? Ne reste pas dans la noirceur pour plaire. Ce serait comme dire à l’Univers: «Tiens, reprend ton cadeau, je n’en veux pas!» Celui qui refuse ton message n'en a pas besoin, tout simplement. Concentre-toi sur celui qui t'encourage à t'exprimer, qui t'encourage à rester vrai. Un jour, quelqu'un m'a dit: «Tu réalises que ce n'est pas pour toi que tu écris?» Cette phrase m'a beaucoup fait réfléchir. Aujourd'hui, c'est à mon tour de te rappeler qu'il te faut obéir à ta vocation.


Aime, ose, crois... Utilise l'art pour passionnément nous raconter ton histoire.

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